Sanctions

Faire face à une sanction disciplinaire : les 5 réponses d'une avocate

Les sanctions disciplinaires sont un dispositif mis en place par la loi pour permettre à un employeur de sanctionner un salarié pour des agissements allant à l'encontre des intérêts de l'entreprise, de l'employeur ou des autres salariés. Quelles sont les différentes sanctions à disposition de l'employeur ? Un salarié peut-il contester ? Que faire en cas d'abus ? Pour répondre à ces questions, nous avons réalisé une interview de Maître Elodie Boucharlat-Odet

Maître Elodie Boucharlat-Odet et son Cabinet EBO Avocat, situé à Lyon 3ème, interviennent principalement en droit du travail (prud’hommes, licenciement, rupture conventionnelle, contrat de travail). Maître Boucharlat-Odet est formatrice en droit du travail auprès du CESI (centre de formation continue), chargée d’enseignement à l’Ecole ESSSE. Elles est également chargées de TD à l’IAE (Institut d'administration des entreprises - Université Lyon 3, ainsi qu’à l’Université Lyon 2).

1) Quels sont les différents types de sanctions qui existent à l’encontre des salariés ?

La loi ne donne  pas de liste de sanctions. Il revient au règlement intérieur de l’entreprise de fixer la nature et l’échelle de celle-ci.

Ainsi, « constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. » (art. L.1331-1 C. trav).

Dès lors, pour être qualifiée de sanction, la mesure prise par l'employeur doit intervenir à la suite d'un agissement du salarié qu'il considère comme fautif.

Encore faut-il que les actes commis par le salarié durant l'exécution de son contrat de travail relèvent du pouvoir disciplinaire de l'employeur (manquements aux règles de discipline de l’entreprise ou bien manquements aux obligations professionnelles du salarié).

Généralement, les sanctions sont classées dans l'ordre croissant suivant :

  • Avertissement ou blâme,
  • Mise à pied disciplinaire (attention, elle doit impérativement être prévue dans le règlement intérieur qui doit, en outre, en fixer la durée maximale),
  • Mutation,
  • Rétrogradation
  • Rupture du contrat de travail.

2) Par exemple, quels sont les faits pour lesquels un salarié ne peut pas être sanctionné ?

Il est clairement établi que les sanctions pécuniaires ou encore discriminatoires sont interdites.


Exemples, jurisprudence très récente :

Refuser de payer des heures supplémentaires au seul motif d’une utilisation abusive  du forfait téléphonique attaché son téléphone professionnel (Cass. soc. 31 janvier  2018, n° 16-14619)


  • Retenue sur salaire pour compenser les frais de réparation d'un véhicule de fonction
  • Refuser à un salarié l’attribution d’une prime en raison d’une faute qu’il aurait commise
  • Refuser à un salarié le bénéfice d’une augmentation de salaire générale pour des motifs disciplinaires

De même, il est interdit de sanctionner un salarié ayant dénoncé de bonne foi des faits répréhensibles commis dans l’entreprise

Enfin, il est de jurisprudence constante qu’un employeur ne pouvait pas sanctionner un salarié à titre préventif, ou bien encore sanctionner plusieurs fois un salarié pour les mêmes faits.

3) La sanction disciplinaire et la sanction pénale vont-elles de pair ?

L’employeur n’est en aucun cas compétent pour sanctionner pénalement un salarié. Il ne peut qu’exercer un contrôle disciplinaire sur lui.

4)  Quelles sont les personnes compétentes dans une entreprise pour infliger une sanction disciplinaire ?

Toute personne disposant du pouvoir disciplinaire en vertu des statuts de l’entreprise et des éventuelles délégations de signature.

5) Est-ce que le salarié peut former un recours contre une sanction, même minime ?

Le Conseil de prud'hommes est compétent pour contrôler le pouvoir disciplinaire de l'employeur.

Le salarié peut donc contester la mesure disciplinaire dont il a fait l’objet dans le respect des délais de prescriptions légaux (art L.1471-1 C. Trav. nouveau) :

  • 2 ans pour les actions portant sur l'exécution du contrat de travail
  • 1 an pour les actions portant sur la rupture du contrat de travail

Le Code du travail prévoit que : « Le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. » (art L.1333-3 C. Trav.)

En revanche, il ne dispose pas du pouvoir de modifier la sanction prononcée par l'employeur.


Attention toutefois, les licenciements, ou bien encore les ruptures anticipées pour faute grave d'un contrat à durée déterminée, sont expressément exclus du champ d'application de ces dispositions relatives au contrôle juridictionnel des sanctions disciplinaires. Ce sont en effet les dispositions relatives à la contestation des irrégularités de licenciement qui sont alors applicables.