Qu'est ce qu'un congé paternité ? Bénéficie-t-il des mêmes prérogatives que celui de la mère ? L'employeur peut-il vous le refuser ? Est-il possible de rompre votre contrat de travail durant un congé paternité ?
Maître Karen Durand-Hakim, avocate au barreau de Paris, est une spécialiste du droit du travail depuis plus de 17 ans. Elle exerce au sein du cabinet DDLC, intervenant exclusivement en droit social. Dans cette interview, Maître Karen Durand-Hakim répond à toutes vos interrogations relatives au congé paternité.
On parle de suspension du contrat de travail pendant le congé paternité car le salarié n’est pas rémunéré par l’employeur mais perçoit des indemnités journalières de la sécurité sociale.
Le congé paternité s’adresse au père de l’enfant mais également à toute personne vivant maritalement avec la mère, quels que soient son sexe et son lien de filiation avec l’enfant. Il s’appelle d’ailleurs, depuis le 1er janvier 2013, le congé de paternité et d’accueil de l’enfant.
Il est ouvert à tous les salariés, quelle que soit la nature de leur contrat de travail et leur ancienneté dans la société.
La durée du congé de paternité et d’accueil de l’enfant est de 11 jours consécutifs ou de 18 jours consécutifs en cas de naissances multiples. Il s’agit de jours calendaires. Il n’est pas fractionnable. Il doit être pris dans les 4 mois suivant la naissance de l’enfant. Il ne peut être reporté au-delà des 4 mois que dans deux cas : l’hospitalisation de l’enfant (dans ce cas le congé pourra être pris dans les 4 mois qui suivent l’hospitalisation) ou le décès de la mère (le congé pourra être pris dans les 4 mois qui suivent la fin du congé dont bénéficie le père en application de l’article L1225-28 du code du travail).
L’employeur ne peut refuser un congé paternité sollicité par un salarié dans les conditions prévues par la loi. En effet, à partir du moment où le salarié a averti son employeur au moins un mois avant la date à laquelle il envisage de prendre son congé tout en précisant la date à laquelle il entend y mettre fin, conformément aux dispositions de l’article L1225-35 du code du travail, l’employeur ne peut s’y opposer et encourt même, en cas de refus, des sanctions civiles et pénales. L’employeur ne peut pas non plus exiger le report du congé paternité.
La Cour de cassation a admis, en mars 2015, la validité d’une rupture conventionnelle signée durant un congé maternité alors même que l’administration, dans sa circulaire du 17 mars 2009 (DGT 2009-4), excluait la possibilité de rompre conventionnellement un contrat de travail avec une salariée en congé maternité.
La Cour de cassation a considéré que, bien que le code du travail interdise toute rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur pendant le congé maternité et pendant les quatre semaines qui suivent le retour de la salariée au sein de l’entreprise, cette disposition n’empêchait pas la conclusion d’une rupture conventionnelle qui repose sur un accord amiable entre le salarié et l’employeur à la condition que l’accord de la salariée ne fasse pas l’objet d’un vice du consentement ou d’une fraude.
Dans ces conditions, il y a tout lieu de penser qu’une rupture conventionnelle puisse être conclue pendant un congé paternité.
Le salarié peut démissionner s’il souhaite rompre son contrat de travail. Son employeur peut également le licencier. Il convient toutefois de noter que, depuis une loi du 4 août 2014 (Loi n° 2014-873 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, art. 9, Jo du 5), les pères bénéficient d’une nouvelle protection qui interdit leur licenciement pendant les 4 semaines suivant la naissance de l’enfant, à l’instar de la protection prévue pour la mère de l’enfant pendant sa maternité et les 4 semaines qui suivent son retour de maternité. Cette nouvelle protection ne s’applique toutefois pas en cas de faute grave de l’intéressé ou en cas d’impossibilité de maintenir le contrat de travail pour un motif étranger à l’arrivée de l’enfant. Il n’est donc pas possible de licencier un salarié qui vient d’être papa pour une faute simple.