Une des nombreuses visions qui perdure à propos du travail est celle qui repose sur l’idée qu’il constitue une souffrance. Le travail est stigmatisé comme une activité rémunératrice mais pénible, pour mettre en valeur les activités qui procurent de la satisfaction.
Le travail entrave l’homme, mettant en avant la souffrance qu'il procure par la mise en œuvre de mouvements pénibles et continus.
La relation entre « travailler » et viser un but qui nécessite de surmonter des résistances influe dans la mise en place de politique de protection sociale pour les salariés, imposant des obligations aux employeurs.
En effet, dans l’optique d’assurer la santé et la sécurité des salariés, tout employeur a une obligation de prévention de la pénibilité au travail. Cette obligation vaut qu’importe la taille, le statut juridique et les activités de l'entreprise.
Une des instruments aidant à assurer la santé et la sécurité des salariés en France prend le nom de compte personnel de prévention de la pénibilité (ou C3P).
Le gouvernement d’Edouard Philippe a proposé une nouvelle version du compte, dans laquelle les modifications dudit compte ont été décriés.
Pourquoi de telles critiques ? Qui sera le plus avantagé par la réforme ? Les salariés y trouveront ils leur compte ? Négliger une telle mesure ne peut être fait en raison de l’importance qu’ont les salariés d’œuvrer dans un environnement sain.
Lorsqu'un salarié est exposé à des facteurs de pénibilité qui dépassent certains seuils, l'employeur doit écrire une déclaration pour conférer ce compte à son salarié.
Le salarié bénéficie alors d'un compte personnel de prévention de la pénibilité sur lequel il peut accumuler des points. Depuis le 1er janvier 2017, le compte de prévention pénibilité fait partie du compte personnel d'activité (CPA).
Le compte pénibilité aide les salariés exerçant un métier harassant. Il comporte 10 critères actuellement.
Le système de points permet aux salariés du privé occupant un poste pénible de cumuler des points, selon des critères établis, afin de partir plus tôt à la retraite, de se former ou de travailler à temps partiel sans perte de salaire.
C’est une déclaration de l’employeur qui créer automatiquement son compte, si bien évidemment, il dépasse les seuils de pénibilité.
Le salarié doit être affilié au régime général de la sécurité sociale ou à la Mutualité sociale agricole pour bénéficier de ce compte de prévention :
Pour que la pénibilité soit caractérisée, il faut que le salarié soit exposé pendant une année complète, au-delà de certains seuils, à un ou plusieurs facteurs de risques pouvant laisser des traces durables, identifiables et irréversibles sur la santé.
Il y’a une technicité en ce qui concerne l’appréciation de la pénibilité : elle doit avoir une intensité et une durée minimales. En effet, les seuils sont appréciés :
Tous les salariés de l'entreprise sont concernés, quel que soit leur contrat (CDI ou CDD).
Le compte est plafonné à 100 points sur l'ensemble de la carrière du salarié. Chaque salarié exposé obtient alors 1 point par trimestre d'exécution et d’exposition à des tâches pénibles sur son C3P.
Elles ouvrent droit à de nombreux avantages :
L'employeur est aussi lié par le fonctionnement du C3P :
Une des premières modifications repose sur la dénomination du dispositif. Le terme « pénibilité » est supprimé. Un tel mot mettait en avant l’idée que le travail constitue une souffrance, une douleur, un fardeau.
Désormais, le « compte pénibilité » aura pour nom « compte professionnel de prévention » (C2P). On observe la volonté du gouvernement de privilégier la prévention en matière d’exposition à des facteurs de risques professionnels.
La modification la plus critiquée découle de la suppression de 4 critères de pénibilité.
La difficulté d’appréciation de ces 4 critères est le souci mis en avant pour justifier leur suppression. L’employeur se devant d’avoir un contrôle constant et un chronométrage de son salarié au cours de l’exécution de ses tâches professionnelles. Physiquement, cela s’avère impossible.
Cependant, une nuance mérité d’être soulignée : ces critères seront reconnus si ils génèrent une maladie professionnelle et entraine un taux d'incapacité permanente de plus de 10%.
Six critères établis demeurent présents :
Une des critiques faites à la loi provient du fait que le risque de « burn-out » n’ait pas été prise en compte.
Véritable drame professionnel, le syndrome d’épuisement lié au travail ne cesse de s’accroitre. Un stress chronique découlant des activités professionnelles.
Il est dû à un stress important et répété. Le stress est une réaction du corps, qui lui permet de se mettre en alerte le temps d’un danger. Il ne doit pas être confondu avec la dépression ou le surmenage.
Le burn-out étant un processus et non un état, il affecte la santé du travailleur. L’épuisement émotionnel conduit à un épuisement physique. Les travailleurs deviennent alors moins impliqués et ont davantage l’intention de quitter leurs emplois.
Une telle définition aurait pu être inscrite dans la loi comme critère de pénibilité. Le corps étant affecté physiquement et physiologiquement, une grande prévention à l’égard de telles souffrances aurait pu justifier l’insertion du burn-out en tant que critère de pénibilité.
Les salariés soumis aux quatre risques qui ne seront plus pris en compte verront ces critères reconnus uniquement s’ils génèrent une maladie professionnelle et conduit à un taux d’incapacité permanente de plus de 10 %. « Une visite médicale de fin de carrière permettra à ces personnes de faire valoir leurs droits" selon le premier Ministre Edouard Philippe.
Cette mesure pose une difficulté : la médecine du travail devra déceler ou reconnaître une éventuelle maladie professionnelle. La logique de prévention est un peu mise à mal. On privilégie alors un contrôle très tardif des risques auxquels le salarié a été exposé.
Il y’a une coquille dans le dispositif : pour qu’un salarié puisse bénéficier d’un départ anticipé à la retraite, il faut que cela soit préparé au préalable. On ignore encore qui de l'entreprise ou la caisse d'assurance maladie sera chargé de cela.
La réforme conduit à ce que, pour qu’un salarié puisse bénéficier d’une retraite anticipée, ce dernier se doit d’être reconnu malade en raison du travail pour bénéficier d’une retraite anticipée, et non plus avoir été durablement exposé à la pénibilité.
L’accès au temps partiel ou à une formation pour se réorienter en fin de carrière disparaît donc aussi pour ces salariés. Les souffrances
A partir du 1er janvier 2018, les entreprises n’auront plus à assumer la charge financière de la pénibilité. Elles ne devront plus verser des cotisations pénibilité.
Jusqu'à présent, elles devaient s'acquitter d'une taxe de 0,01% des rémunérations versées aux salariés. Une autre cotisation s’y ajoutait pour les employeurs ayant exposé au moins un de leurs salariés à la pénibilité existe également de 0,07%
Le compte professionnel de prévention sera financé par la branche accidents du travail de la Sécurité sociale, donc par la solidarité nationale.
Le signal lancé est que, les entreprises ne sont plus concernées par les possibles cas de souffrance au travail. La population cotisera à cette protection sociale à travers l’impôt.
Le gouvernement a tout de même précisé que cette solution était "temporaire". L’idée est ensuite d'augmenter les cotisations ATMP pour financer ce dispositif.
Conclusion : L’actuelle réforme fait peser un peu moins de lest sur les entreprises. Ces dernières ne financent plus les dispositifs sur la pénibilité. Elles sont aussi exonérées en partie de la responsabilité qu’elles sont sur les salariés en matière de santé et de sécurité de ces derniers.