Qu'est-ce qu'une prise d'acte ? Qui peut prendre acte de la rupture ? A quelles conditions ? Faut-il respecter une certaine procédure ? Quelles sont les indemnités reçues par le salarié ? Quels sont les effets de la prise d'acte ? Quant est-il des allocations chômage ?
Me Rodolphe HUBER, Avocat au Barreau de Lille, est titulaire d’un DEA Droit Social et Docteur en Droit privé. Son activité principale concerne le droit du travail, en conseil et contentieux. Il enseigne également le droit du travail à la Faculté.
La prise d’acte est un mode de rupture du contrat de travail original par lequel le salarié met fin à son contrat de travail en invoquant des griefs qu’il impute à son employeur.
Qui peut prendre acte de la rupture ? A quelles conditions ?
Ce mode de rupture est uniquement ouvert au salarié.
Celui-ci considère que son employeur s’est rendu coupable de graves manquements à ses obligations (comme par exemple : non-paiement du salaire, modification imposée du contrat de travail, actes de harcèlement moral…) et, ne pouvant laisser perdurer cette situation qui lui cause préjudice, il va prendre l'initiative de rompre son contrat de travail tout en imputant la responsabilité de cette rupture à l'employeur.
Existe-t-il une procédure à respecter pour prendre acte de la rupture ?
La prise d’acte n’est soumise à aucun formalisme particulier.
Un avocat peut par exemple prendre acte de la rupture du contrat au nom de son client.
Il convient toutefois, pour des questions de preuve, de notifier sa décision à l’employeur par LRAR.
Ensuite, il faudra saisir le Conseil de prud’hommes qui devra analyser si les griefs invoqués pour rompre le contrat sont fondés ou non. Si ces griefs sont fondés, la prise d’acte sera requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; si pas, elle sera requalifiée en démission.
La prise d’acte, en tant que telle, n’a pour effet que de rompre immédiatement le contrat de travail. Le salarié ne touchera donc dans l’immédiat que son solde de congés payés.
Il pourra ensuite toucher d’autres indemnités quand les juges auront tranché le litige et requalifié la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse. En tel cas, le salarié a droit, s’il remplit les conditions : à une indemnité de licenciement, une indemnité de préavis, et des dommages et intérêts pour licenciement abusif.
L’effet principal de la prise d’acte est la rupture immédiate de la relation de travail.
C'est en principe à la date d’envoi de la prise d'acte que prend fin le contrat de travail. Dès lors que la prise d'acte entraîne la cessation immédiate du contrat de travail, c'est à cette date que le certificat de travail et l'attestation Pôle Emploi sont exigibles.
Les autres effets dépendront de l’analyse qui sera réalisée par les juges des griefs invoqués, et de la requalification de la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou démission….
La prise d'acte ne constitue ni un licenciement, ni une démission, tant que les juges n’ont pas statué.
L’attestation Pôle emploi sera remplie en « Autre motif » avec la mention « prise d'acte ».
Sauf exceptions, Pôle emploi ne considère pas la prise d’acte, tant que les juges ne l’ont pas requalifié en licenciement abusif, comme une perte involontaire d’emploi. En principe, le salarié qui a pris acte de la rupture de son contrat de travail ne perçoit donc aucune allocation chômage.
Il ne pourra éventuellement prétendre à une indemnisation qu’après le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes jugeant la prise d’acte justifiée.