La première erreur à éviter en amont de l’entretien annuel est de prévoir que ce dernier sera mené par une personne de l’entreprise qui n’est pas à même d’apprécier l’activité des salariés évalués : il faut prévoir que cette évaluation sera menée par le Manager direct des salariés et non par un représentant de la direction qui n’a jamais été à même de constater les compétences des salariés et qui se référerait à des propos qui lui auraient été rapportés par des personnes tierces.
À cet égard, l'exercice du pouvoir de direction de l'employeur n'est pas discrétionnaire, de telle sorte qu'en cas de contestation de la part d'un salarié, l'employeur doit démontrer qu'il a exercé son pouvoir patronal à bon escient.
A titre d'exemple, on considère qu'il n'a pas exercé son pouvoir à bon escient si un salarié n'a pas eu d'augmentation ou d'évolution de carrière malgré plusieurs années d'ancienneté alors qu'il a démontré ses capacités à occuper le poste qu'il souhaiterait occuper durant des périodes de remplacement de certains collègues. Ce salarié peut obtenir la réparation du préjudice subi du fait des obstacles ainsi mis à l'évolution de sa carrière au sein de l'entreprise (CA Versailles, 13 septembre 2001, n°00-1098).
L’employeur doit aussi prendre la précaution de prévoir un temps durant lequel le salarié pourra lui faire part de ses doléances, afin d’améliorer sa perception de l’activité du salarié.
Le Code du travail et la jurisprudence fixent les obligations de l’employeur avant d’organiser l’entretien annuel.
L'article L. 2323-32 du Code du travail impose à l'employeur une obligation d'information et de consultation préalable du comité d'entreprise sur les moyens et techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés (techniques de surveillance ou de moyens d'évaluation des salariés). Cette consultation doit permettre au comité d'entreprise de donner son avis sur la pertinence et la proportionnalité entre les moyens utilisés et le but recherché.
De même, le projet de mise en place d'entretien annuel d'évaluation des salariés doit être soumis à la consultation préalable du CHSCT, dès lors que les modalités des enjeux de l'entretien sont manifestement de nature à générer une pression psychologique entraînant des répercussions sur les conditions de travail (Cass. Soc., 28 novembre 2007, n°06-21.694).
Le dispositif d'évaluation qui génére un stress durable et excessif peut être déclarée illicite ; en effet, la mise en place d'un dispositif d'évaluation peut être de nature à générer une pression psychologique ayant une incidence sur les conditions de travail des salariés, raison pour laquelle le CHSCT doit être préalablement consulté (TGI Versailles, 28 octobre 2010, n°10-270).
L'article L. 1222-3 du Code du travail prévoit que l'employeur doit également informer préalablement le salarié des méthodes et techniques d'évaluation professionnelle mises en œuvre à son égard.
Si le dispositif de notation des salariés réalisés à l'occasion d'un entretien annuel repose sur des critères comportementaux difficilement quantifiables et détachés de toute effectivité du travail accompli, alors que cette notation peut avoir un impact sur les conditions de travail et peut placer les salariés dans une insécurité préjudiciable à leur santé mentale, ce dernier doit être déclaré illicite (TGI Nanterre, 5 septembre 2008, n°08-5737).
L'évaluation du comportement d'un salarié doit donc reposer sur des critères précis et objectifs (TGI Paris, 6 mars 2012, n°11/15323).
Le fait pour un employeur de procéder à une évaluation des compétences d'un salarié en y faisant figurer des critiques fondées sur des critères subjectifs et s'accompagnant de reproches injustifiés, répétées et rapprochées dans le temps, le salarié ayant connu un déroulement de carrière sans difficulté, était constitutif de harcèlement moral (CA Toulouse, le 27 juin 2009, n°08-2767).
Conclusion
Le conseil que je peux donner aux employeurs est donc de préparer soigneusement les critères qui serviront de support à l’entretien individuel d’évaluation, d’être transparent sur ces derniers et de se conformer à leurs obligations légales d’information et de consultation des représentants du personnel et des salariés en la matière. Il faut éviter d’utiliser des critères de notation et de classement des salariés en les positionnant sur une échelle de performances. Vous devez respecter les dispositifs légaux rappelés par la jurisprudence et le Code du travail et vous efforcer de conserver une neutralité et une objectivité.