Droit du travail

Transfert d’entreprise : quelles conséquences pour les salariés ?

Vous êtes concernés par un transfert d’entreprise ? Que risquez-vous ? Quelles vont être les conséquences sur votre situation personnelle. Nous vous expliquons le transfert d’entreprise du point de vue des incidences que peut avoir cette opération pour les salariés dont le contrat est transféré.

1) Le transfert de plein droit des contrats en cas de transfert d’entreprise

« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise » article L.1224-1 du code du travail. Ainsi, si votre entreprise doit être transférée d’un employeur à un autre, ce dernier ne pourra pas vous licencier au cours du processus.

Ce transfert de plein droit des contrats de travail du cédant, l’ex-employeur, au repreneur, le nouvel employeur, est un principe d’ordre public. C’est-à-dire qu’il est impossible de prévoir par une clause, un accord etc… que les contrats de travail ne seront pas repris par le nouvel employeur. Et ce, peu importe les types de contrats, qu’ils soient à durée déterminée ou non, à temps partiel ou non, qu’il s’agisse de contrats d’apprentissage… Il est d'ailleurs impossible de licencier un salarié au motif d’un transfert d’entreprise. Le licenciement ne sera possible qu’avant ou après le transfert, pour une cause réelle et sérieuse étrangère à ce transfert. Le repreneur ne pourra évidemment pas imposer une nouvelle période d’essai aux salariés concernés par le transfert.

2) Les différentes hypothèses en cas de transfert partiel

Dans le cas où seule une partie de l’entreprise serait cédée, les salariés concernés verront leur contrat transféré dans la limite de la partie correspondant à la partie transférée. Exemple de Thierry, employé dans une entreprise spécialisée dans la vente de meubles. Cette entreprise compte 3 magasins et à l’occasion d’un transfert, il est procédé à la cession d’un de ces magasins. Thierry ne travaille pas dans l’établissement transféré, la cession n’a donc pas de conséquence sur sa situation. Maintenant imaginons que Thierry travaille 2 jours par semaine dans le magasin transféré et le reste du temps dans les autres établissements. Il passera alors au service du nouvel employeur, mais seulement pour la partie de l’activité qu’il consacrait à l’établissement cédé.

Par ailleurs, dans le cas, encore, où un salarié exercerait l’essentiel de ses fonctions au sein de l’entité transférée, son contrat de travail sera intégralement transféré. Prenons l’exemple de Philippe dont le contrat implique que le principal, voir la quasi-totalité de son travail se fera dans le secteur d’activité transféré. Son contrat sera alors intégralement transféré.

3) En cas d’opposition d’un salarié au transfert de son contrat

Le transfert de leur contrat de travail s’impose aux salariés concernés. Ainsi, le refus d’un salarié de poursuivre l’exécution de son contrat de travail auprès du nouvel employeur équivaut démission de sa part. A ce titre, il ne touchera pas d’indemnité. Cependant, rien n’interdit à l'employeur cédant de s’engager à conserver les salariés refusant le transfert de leur contrat de travail.

Attention cependant, l’article L.1224-1 ne s’applique qu’en cas de transfert d’une entité économique autonome. Si les conditions de transferts, au sens de cet article, ne sont pas remplies, il est possible d’en faire une application volontaire mais le transfert de leur contrat de travail ne s’imposera alors pas aux salariés. Ces derniers devront donner leur accord pour que le transfert de leur contrat s’opère. Faute d’accords des salariés, leur employeur sera tenu de poursuivre la relation de travail avec eux, ou bien s’exposera à une condamnation pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

4) Les obligations de l’employeur cédant

L’employeur cédant n’est pas obligé d’informer les salariés concernés que leur contrat sera transféré. C’est sur le repreneur que pèse cette obligation d’information au personnel d'une modification de l'employeur, d’après une décision n° 06-40.025 rendue le 4 juillet 2007 par la chambre sociale de la Cour de cassation.

L’employeur cédant, uniquement en cas de transfert partiel, devra obtenir l’autorisation de l’inspecteur du travail pour que puisse-être procédé au transfert de salariés protégés. Il s’agit bien entendu d’éviter des cas de fraude où un employeur profiterait de devoir céder une partie de son activité en prononçant la mutation de salarié, dont il souhaite se séparer, sur cette partie de son activité. Si cela est interdit dans tous les cas, les salariés protégés font l’objet d’une surveillance accrue.

5) Les obligations du repreneur

Lors du transfert, les contrats de travail en cours sont maintenus dans les conditions mêmes où ils étaient exécutés auparavant, qu’importe que le transfert des contrats soit volontaire ou non. Ainsi, les salariés garderont la même qualification, la même rémunération, la même ancienneté, leur logement de fonction s’ils en ont un. En bref, le repreneur, tout comme un employeur en général, ne peut modifier les éléments principaux du contrat de travail d’un salarié sans obtenir au préalable l’accord de ce dernier. Cela recouvre principalement les clauses qui touchent au temps de travail et à la rémunération.

Avant la loi travail du 9 août 2016, il était considéré que les avantages individuels acquis par les salariés étaient incorporés à leur contrat de travail. Que ni l’employeur, ni un éventuel repreneur ne pouvait donc les modifier. Désormais, il n’est plus question d’avantage acquis. L’article L.2261-13 du Code du travail, prévoyant autrefois ces derniers, précise désormais que seul le niveau de la rémunération atteint pendant les 12 derniers mois sera acquis, et donc maintenu.

6) Qu’advient-il des avantages collectifs à l’occasion du transfert ?

En cas de transfert, les éventuels usages d’entreprises pourront être dénoncés par le repreneur. C’est-à-dire que le nouvel employeur pourra supprimer un usage, tel que le versement d’un 13ème mois par exemple, à condition d’informer les salariés de cette mesure et de respecter un délai de préavis entre cette information et la suppression effective de l’usage.

Il est par ailleurs possible qu’un accord d’entreprise ou qu’une convention collective soit mise en cause à l’occasion du changement d’employeur. La mise en cause ne pourra se faire qu’à condition qu’un délai de préavis de 3 mois ait été respecté au préalable. Une nouvelle négociation aura alors lieu et il sera possible d’adapter les anciens accords en fonction des changements survenus, ou si nécessaire, de procéder à l’élaboration de nouveaux textes, dans un délai d’un an à compter de la dénonciation. Pendant ces 15 mois (3 mois de préavis + 12 mois pour négocier), les conventions collectives et accords d’entreprise applicables jusque-là continueront à faire effet. Ce délai d’un an passé, soit de nouveaux textes viendront remplacer les anciens, soit la négociation aura échoué et les salariés continueront alors à bénéficier de l’accord et de la convention collective d’origine.


Conclusion :

A l’occasion d’un transfert d’entreprise, on distingue selon que le transfert des contrats de travail soit obligatoire, au titre de l’article L.1224-1 du Code du travail, ou volontaire parce que les conditions légales rendant obligatoire ce transfert en sont pas réunies. Uniquement dans ce dernier cas, les salariés concernés pourront s’opposer au transfert de leur contrat. Si le transfert n’est pas volontaire, il s’impose à eux et leur refus sera analysé comme une démission. Le repreneur est obligé de reprendre les contrats transférés. Il ne peut ni licencier les salariés au motif du transfert, ni modifier les éléments essentiels de leur contrat de travail.

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