Salarié dans une entreprise depuis quelques années, vous envisagez de quitter votre emploi prochainement. La question qui se pose donc est de savoir quel moyen vous comptez utiliser pour le faire. Démission, prise d’acte, rupture conventionnelle, abandon de poste, résiliation judiciaire, autant de possibilités mais pouvant s’avérer un réel casse-tête. Décryptage.
Dans l’imaginaire commun, la démission est le moyen le plus simple et le plus sûr de rompre son contrat. S’il est vrai que votre employeur ne peut vous la refuser, c’est aussi le moyen de rupture le moins avantageux pour le salarié.
La jurisprudence a eu l’occasion de rappeler à de multiples reprises que la démission se devait être claire et non équivoque ce qui signifie qu’elle ne doit jamais être issue d’une pression de l’employeur. Cette décision doit venir de vous et de vous-seul.
La démission ne signifie pas que vous pouvez quitter l’entreprise du jour au lendemain. Vous devez obligatoirement respecter un préavis, prévu par les conventions et accords collectifs (généralement 1 mois pour les employés, 3 mois pour les cadres). L’employeur est en mesure de vous dispenser ce préavis mais il ne devra, par conséquent, pas vous le payer.
Nous rejoignons l’avis de nombreux avocats sur la question. Dans la mesure du possible, il faut éviter de démissionner puisque cela est synonyme de privation des droits sociaux. Vous ne recevrez aucune indemnité de départ et ne bénéficierez pas du droit au chômage. A moins d’être certain de son avenir, d’avoir un nouvel emploi à l’issue du préavis, ne démissionnez pas. Être démissionnaire est le plus beau cadeau que vous pouvez faire à votre employeur puisque cela sera gratuit pour lui, encore plus si celui-ci était fautif et vous a poussé à quitter votre travail.
Dans une situation où vous estimez que votre employeur commet ou a commis des manquements graves à ses obligations contractuelles (non-paiement d’heures supplémentaires, harcèlement de tout type etc.), la rupture à envisager est la prise d’acte du contrat de travail. C’est la Cour de Cassation qui, en 2003, l’a consacré par un arrêt rendu le 25 Juin (Technoram). Elle la qualifie de rupture par le salarié du fait de l’employeur.
A une prise d’acte, 2 issues possibles. C’est le Conseil de Prud’homme qui en déciderai au cas par cas :
Produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits reprochés justifient la prise d’acte. C’est-à-dire qu’ils sont suffisamment graves. Indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse, indemnité de préavis, et droit au chômage.
Produira les effets d’une démission si les juges estiment que les faits reprochés ne sont pas suffisamment graves. Aucune indemnité, aucun droit au chômage.
La prise d’acte est très intéressante du fait que le Conseil de prud’hommes ait à rendre une décision dans la limite d’un mois suivant la saisine, elle est donc relativement rapide. Néanmoins elle est plutôt risquée puisque si les juges ne vont pas dans le sens du salarié, la rupture produira les effets d’une démission ce qui peut être particulièrement embarrassant. Il faut donc être sûr de son coup.
La résiliation judiciaire est une alternative à la prise d’acte. Là aussi, le salarié reproche des faits fautifs à son employeur. Cependant, à la différence de la prise d’acte où le salarié notifie directement la rupture à son employeur, dans le cas d’une résiliation judiciaire, l’affaire est portée devant le conseil des prud’hommes instantanément.
La résiliation judiciaire est donc à envisager si le salarié n’est pas absolument sûr de lui quant à la gravité des faits reprochés. S’ils sont suffisamment graves, elle produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à l’instar d’une prise d’acte. En revanche, la différence majeure réside dans l’effet qu’elle produit si les faits ne sont pas jugés suffisamment graves. En effet, le cas échéant, le contrat de travail se poursuit et la résiliation ne produit pas les effets d’une démission. La résiliation ne met pas un terme à la relation contractuelle.
Ce mode de rupture est donc beaucoup moins risqué et permet aux salariés de garder son poste si la décision ne lui est pas favorable et de conserver une rémunération durant la procédure, qui, en revanche, s’avère plus longue que pour une prise d’acte.
La rupture conventionnelle a remplacé en 2008 la rupture « d’un commun accord ». La cour de Cassation la voit d’un très bon œil, et les autorités administratives également puisqu’elles n’en refusent que rarement l’homologation. Plusieurs confédérations syndicalistes comme la CGT la craignent pour leur part. Ils la voient comme un moyen pour l’employeur de déguiser des licenciements en mettant la pression sur le salarié. Cela leur permet en effet d’éviter la lourde procédure du licenciement.
Néanmoins la rupture conventionnelle est un excellent compromis pour les deux parties. Le salarié n’est pas privé du chômage et bénéficie d’une indemnité légale correspondante à à 1/5 du salaire multiplié par le nombre d’année d’ancienneté. L’avantage est que le salarié peut négocier des indemnités plus grandes (des conventions collectives prévoient même des indemnités supra-légales) mais également sa date de départ. Il n’est donc pas soumis à un préavis. La date de départ est donc discutée entre employeur et salarié. Si ce dernier n’est pas à l’aise en négociation, il peut se faire accompagner, mais pas par un avocat.
La rupture conventionnelle est la solution qu’il faut privilégier dans tous les cas à moins que l’employeur soit fautif. Elle connaît d’ailleurs un fort succès dans le monde du travail depuis sa création. Son nombre croît exponentiellement chaque année (7,5 % sur un an à la même période, selon la DARES qui produit des études statistiques). Préférez la rupture conventionnelle à la démission, les avantages sont bien plus nombreux pour le salarié. Voici nos conseils pour l’obtenir auprès de votre employeur.
Bon nombre de salariés qui envisagent de quitter leur poste pensent à l’abandon de poste. Il arrive même que des patrons peu scrupuleux les poussent à le faire pour éviter de payer des indemnités de rupture. L’abandon de poste consiste pour le salarié, comme son nom l’indique, à ne plus se présenter au travail. L’employeur doit vous sommer de revenir. S’il le fait et que vous refusez, il pourra alors vous licencier pour faute grave. En effet, toute absence doit être justifiée, autrement, vous vous rendez coupable d’une faute. Il se peut même que vous ayez à dédommager votre employeur.
L’abandon de poste est une fausse bonne idée. Vous vous rendez coupable d’une faute et en subirez les conséquences. Licenciement, dédommagement et mauvaise opinion de votre patron qui pourrait parfaitement vous portez préjudice si celui-ci était consulté par un éventuel futur employeur qui aimerait un avis extérieur sur vous. Nous le déconseillons.
Le grand vainqueur est sans contestation possible la rupture conventionnelle. Simple et avantageuse, employeurs et salariés y trouvent leur compte.
Néanmoins n’oubliez pas d’envisager une résiliation judiciaire ou une prise d’acte si votre employeur s’est rendu coupable d’une faute.