La fiscalité est un domaine complexe, qui évolue en permanence. Difficile de toujours pouvoir s'y retrouver et comprendre ce qui attend un salarié, notamment pour savoir comment seront imposés ses indemnités ou comment s'organise la récente mise en place du prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. Pour pouvoir apporter des réponses à ces questions, nous avons pu interviewer Maître d'Onorio Di Méo.
Maître Eve d’Onorio di Méo a une double casquette, l’une étant complémentaire de l’autre. Maître d'Onorio di Méo est avocate fiscaliste depuis plus de 10 ans, pour toute les problématiques fiscales des particuliers et des entreprises en France comme à l’international.
Plus récemment tournée vers la transformation numérique de mon métier, elle s'est également lancée dans l’aventure entrepreneuriale, en cofondant la startup MaFiscalité.com. Cette plateforme est la 1ère « Legaltech » française d’assistance fiscale en ligne et a pour objet le règlement de petits litiges en matière fiscale et l’assistance à la déclaration fiscale.
Elle permet en effet, de combiner la recherche d’informations en matière de fiscalité, la gestion d’une procédure fiscale grâce à des modèles payants, la mise à disposition d’outils, et enfin, la possibilité d’être mis en relation avec un avocat fiscaliste.
Dans le cadre d’un contrat de travail, le salaire est l’ensemble des rémunérations ou des prestations fournies par un employeur à chacun de ses salariés en rétribution de leurs services. Une prime, quant à elle, est un complément de salaire versée par l’employeur au salarié en sus du salaire normal, soit à titre de remboursement de frais, soit pour encourager la productivité, tenir compte de certaines difficultés particulières du travail, ou récompenser l’ancienneté.
Par ailleurs, de son premier sens, l’indemnité est une compensation financière (somme d'argent) destinée à réparer un dommage. L’indemnité de départ à la retraite est une indemnité qui est due par l'employeur au salarié qui quitte l'entreprise pour bénéficier d'une pension de retraite. L'indemnité de licenciement, quant à elle, est versée à tout salarié d’une entreprise qui a fait l’objet d’un licenciement. L’indemnité perçue sera calculée en fonction de son ancienneté dans l’entreprise.
Les sommes perçues en fin d’activité se caractérisent par toute indemnité versée à un salarié à l'occasion de la rupture de son contrat de travail (retraite ou licenciement). Cela constitue, en principe, une rémunération imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des traitements et salaires.
Toutefois ce principe est tempéré par certaines mesures d'exonérations prévues en faveur des indemnités suivantes : indemnités de licenciement; indemnités de cessation forcée des fonctions versées aux mandataires sociaux et aux dirigeants; indemnités de départ à la retraite ou en préretraite; indemnités versées dans le cadre d'un plan de sauvegarde de l'emploi; indemnités de rupture conventionnelle du contrat de travail.
Les indemnités de licenciement (versée en dehors d’un plan de sauvegarde de l’emploi qui sont exonérées en totalité) sont exonérées d’impôt sur le revenu dans la limite la plus élevée des trois montants suivants :
La fraction des indemnités de licenciement exonérée en application des deux dernières limites ne peut excéder six fois le montant annuel du plafond de la sécurité sociale (PASS) en vigueur au moment du versement de l’indemnité. Ce plafond est fixé à 235 368 € pour les indemnités versées en 2017. Le plafond d’exonération des prélèvements sociaux (cotisations sociales, CGS, CRDS) est fixé à 2 PASS, soit 78 456 € en 2017.
Ces limitations s'appliquent au montant global des indemnités perçues(hors bien entendu les primes et indemnités qui sont imposables) au titre de la rupture du contrat de travail. Tel est notamment le cas lorsque les indemnités de licenciement sont versées par plusieurs entreprises.
Les indemnités de rupture conventionnelle homologuée versées à l'occasion de la rupture conventionnelle du contrat de travail d'un salarié sont exonérées dans les mêmes conditions que les indemnités de licenciement, si le salarié bénéficiaire n'est pas en droit de bénéficier d'une pension de retraite d'un régime légalement obligatoire.
Les indemnités de départ à la retraite ou préretraite hors cas du PSE, sont exonérées en totalité sans limitation à hauteur de leur montant légal ou conventionnel. Lorsque le montant de l’indemnité excède celui prévu par la loi ou la convention collective, l’indemnité est exonérée à hauteur du plus élevé des montants suivants :
D’autres indemnités sont exonérées sans limitation de montant, comme le licenciement sans cause réelle et sérieuse ou si elles interviennent dans le cadre d’un PSE. .
Les indemnités consécutives à une démission constituent une rémunération imposable. Sont également imposables les indemnités de non-concurrence, compensatrices de congés payés, de préavis ainsi que les indemnités compensatrices de préavis versées aux salariés avec dispense d'effectuer le préavis.
C’est le salarié qui supporte le principe d’imposition dans la catégorie de l’impôt sur le revenu des indemnités en question pour l’année de leur versement.
En cas de versement d’une indemnité importante et imposable, la fraction imposable de l’indemnité peut bénéficier du système du quotient permettant d’atténuer les effets de la progressivité de l’impôt. Le système du quotient consiste à calculer l'impôt correspondant à l’indemnité perçue en divisant le montant de ce revenu par un coefficient égal à 4, en ajoutant au revenu net global « courant » le chiffre résultant de cette division, puis en multipliant par le même coefficient de 4 la cotisation supplémentaire ainsi obtenue.
L’entrée en vigueur du prélèvement à la source (PAS) de l'impôt sur le revenu est fixée au 1er janvier 2019. Ce PAS vient adapter le recouvrement de l'impôt au titre d'une année à la situation réelle de l'usager (revenus, événements de vie) au titre de cette même année, sans en modifier les règles de calcul. Il a pour objectif de supprimer le décalage d'un an entre la perception des revenus et le paiement de l'impôt sur ces revenus.
La retenue à la source consiste à faire prélever le montant de l’impôt par un tiers payeur (employeur) au moment du versement au contribuable des revenus sur lesquels porte l’imposition. Cette réforme va s’appliquer aux salariés, aux retraités et aux indépendants. Ainsi, tous les revenus d’activité (salaires et professions indépendantes), les retraites, les revenus de remplacement et les revenus fonciers seront concernés.
Les modalités de prélèvement vont différer en fonction de la nature des revenus ; ainsi pour les salaires et les revenus assimilés (retraites et chômage), l’impôt sera collecté par l’entreprise ou l’organisme versant les revenus, qui appliquera le taux d’imposition transmis de manière automatisée par l’Administration fiscale.
La mise en place du prélèvement à la source commencera au printemps 2018. L’administration fiscale communiquera à l’employeur (ou autres verseurs de revenus) le taux de prélèvement qui sera calculé sur la base des revenus 2017 déclarés au printemps 2018. Le contribuable connaitra également ce taux puisqu’il figurera sur son avis d’imposition adressé à l’été 2018.
Au 1er janvier 2019 ce taux de prélèvement sera appliqué au salaire, pension, ou revenu de remplacement : le PAS sera automatique, et apparaitra clairement sur la fiche de paie. Le taux normalement applicable pourra, à la demande du salarié, être substitué au taux neutre, ainsi la confidentialité sera assurée. Le taux du prélèvement sera calculé par l'administration sur la base des revenus connus en appliquant aux assiettes respectives de la retenue à la source et de l'acompte un taux d'imposition unique calculé par l'administration pour chaque foyer fiscal. En cas de hausse ou de baisse importante de vos impôts, les contribuables pourront demander à l’administration de moduler le montant du prélèvement à la source. En cas de changement de situation familiale, les contribuables ne pourront demander la modulation du prélèvement à la source au fisc qu'après l'avoir informé du changement intervenu.
Plusieurs dispositions sont toutefois prévues pour garantir la confidentialité des informations personnelles des contribuables :
Prenons un exemple pour illustrer la meilleure méthode pour un départ à la retraite avec cette année blanche 2018. Il est tout d’abord important de rappeler qu’il faut procéder à des calculs judicieux afin d’organiser au mieux son départ à la retraite et de tirer profit de ce PAS.
Ainsi, si la retraite est prise en 2019, l’impôt sur les revenus 2018, hors indemnité de départ, sera totalement annulé. Son impôt 2019, sera ajusté au montant de ses pensions. Pour se faire, une mise à jour en cours d’année du taux de prélèvement devra être demandée, faute de quoi, le taux applicable au vu des revenus de l’année précédente sera utilisé.
L'indemnité de départ en retraite n'échappe pas, sauf situations spécifiques, à l'impôt sur le revenu. En fonction des modalités conventionnelles ou contractuelles applicables, elle peut être plus ou moins élevée et provoquer une hausse sensible de l'impôt sur le revenu. Si elle est perçue en 2018, année pour laquelle les salaires, retraites et les revenus fonciers récurrents ne seront pas taxés en 2019, afin d'éviter une double imposition, cette indemnité sera tout de même soumise à l'impôt en 2019 selon les modalités habituelles. Car l'administration fiscale la considère comme un revenu exceptionnel« qui, par sa nature, n'est pas susceptible d'être recueilli annuellement ». Il n'y a donc ici aucune stratégie spécifique à mettre en place pour minorer l'impôt à payer.