Licenciement

Peut-on hurler sur son patron ?

Il existe trois critères définissant le contrat du travail : la rémunération, la prestation de travail, et le plus important : le lien de subordination. Ainsi, tout salarié est « soumis » au pouvoir patronal. L’employeur dispose alors de différents pouvoirs lui permettant d’appuyer ce lien de subordination, dont le pouvoir disciplinaire. Vous avez eu une altercation avec votre employeur ? Le ton est monté et vous vous êtes emportés ? Voici ce que vous risquez.

1. La liberté d'expression du salarié. 

Le droit du travail est très clair, on ne peut apporter de restrictions aux droits des personnes et à leurs libertés individuelles et collectives. Seule exception, dans le cas où la nature de la tâche à accomplir l'exige. Plus encore, les salariés jouissent de leur liberté d'expression aussi bien sur au travail qu'en dehors, tant qu'ils n'en absuent pas, et aucune sanction ou licenciement ne peut être motivé par cette liberté. 
Quelle que soit votre hiérarchie dans l’entreprise, votre liberté d’expression ne peut être restreinte. Cependant, comme le dit si bien le proverbe, votre liberté s’arrête là où celle des autres débute. Par conséquent, il ne faut pas que cette liberté d’expression dégénère en abus. Ainsi, dans le cas d’une altercation avec votre patron, il est vivement déconseillé de lui parler comme on parlerait à un ami avec lequel on débat dans un café sur un sujet quelconque. Du fait du lien de subordination qui vous sépare de votre patron, vous êtes obligés, autant que lui, de le respecter.
Mais l’humain a ses défauts, et lors d’une réunion le ton peut vite monter, voire exploser, avec votre patron.

2. Les conséquences en pratique. 

Il faut tout d’abord comprendre le régime du licenciement pour faute, dit licenciement pour motif personnel. Ce licenciement est alors fondé sur un motif inhérent à la personne du salarié. Est-ce que le fait de hurler sur patron est un motif pour être licencié ? Selon les cas de figures, la réponse à cette question varie. Pour y répondre prenons deux exemples concrets.

D’un côté, prenons le cas d’un salarié, Marc, qui ne s’entend pas du tout avec son patron. Ainsi, à chaque réunion ou à chaque discussion professionnelle entre eux deux, le ton monte. Marc, qui a le sang chaud, n’hésite pas à s’en prendre verbalement à son supérieur quand quelque chose ne lui va pas. Après plusieurs avertissements disciplinaires, son patron décide de le licencier pour faute grave. En effet, il l’accuse de tenir des propos injurieux et diffamatoires à son sujet et engage une procédure de licenciement pour faute grave suivant le motif d’insubordinations graves et répétées. En cas de contestation de Marc devant le Conseil des Prud’hommes, ces derniers n’hésiteront pas à lui rappeler qu’il a commis une faute grave. Il a en effet abusé de sa liberté d’expression à partir du moment où les altercations avec son patron étaient répétées et qu’il tenait des propos en injurieux.

De l’autre côté, Marie, salariée exemplaire depuis plus de deux ans dans son entreprise, a hurlé sur son patron suite à une réunion houleuse. Ce dernier, lui ayant reproché une erreur qu’une autre personne a commise, n’a pas hésité à lui remettre les pendules à l’heure. Marie ne se laisse pas faire et hurle sur son patron pour lui faire comprendre qu’elle n’est pas l’auteur de cette erreur. La Chambre Sociale de la Cour de Cassation a énoncé dans un arrêt que sauf abus résultant de propos injurieux, diffamatoires ou excessifs, le salarié jouit, dans l’entreprise, de sa liberté d’expression à laquelle seules des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées. Ainsi, le patron pourra reprendre sa salariée, mais un licenciement pour faute serait automatiquement requalifié par le Conseil des Prud’hommes en licenciement abusif.

Le Mot de la Fin.

Il ne faut pas oublier que le lien de subordination est ce qui régit la relation de travail entre l’employeur et son patron, par conséquent, on ne peut théoriquement pas hurler sur son patron. Cependant, nous sommes humains, et il arrive à tous de se laisser emporter, mais une seule fois !