La religion constitue une liberté. Chaque citoyen peut librement choisir et pratiquer sa religion. Il s'agit d'une liberté fondamental de l'Homme reconnue par la loi. Cependant, cette liberté citoyenne est-elle la même sur le lieu de travail des salariés ? Quant est-il de la liberté religieuse au travail ? Que prévoit la loi en la matière ? Vous trouverez toutes les réponses dans cette fiche pratique !
La liberté religieuse est une liberté fondamentale reconnue par l'article 10 de la DDHC (Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen) : "Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre public établi par la Loi."
Il en ressort que la liberté religieuse est fondamentale. Le texte vient poser une limite. En effet, l'exercice de cette liberté ne doit pas troubler l'ordre public. Plus précisément, le citoyen ne pourra abuser de cette liberté et des limites existeront : l'ordre public prévalant sur la liberté religieuse.
Cette liberté est également reconnue au salarié dans le cadre de son travail, s'agissant d'une liberté fondamentale et non individuelle. Cependant, son employeur pourra la restreindre, sous le respect de certaines conditions. En cas d'irrespect, par le salarié, des limites posées, il pourra être sanctionné voire licencié pour faute. Notant que l'employeur ne pourra interdire de manière générale et absolue l'exercice de la liberté de religion. Il pourra uniquement poser des limites.
La législation en matière de liberté religieuse est différente selon que le salarié travaille dans le secteur public ou privé.
La Constitution de 1958 a posé le principe de laïcité dans le secteur public. En effet, la loi de 1901 a séparé l'Eglise et l'Etat. L'Etat possède une liberté de conscience, qui doit être exprimée sans distinction de religion. Au sein du secteur public, la laïcité constitue un principe fondamental, qui a été réaffirmé lors du comité interministériel sur l’égalité et la citoyenneté du 6 mars 2015.
Plus précisément, l'article 6 de la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires prévoit que « La liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires. Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses [...] »
Les salariés de la fonction publique font fasse au principe de neutralité, posé par l'arrêt du Conseil d'Etat Lebon du 8 décembre 1948. Ce principe s'applique pour tous les fonctionnaires titulaires ou non ainsi que pour les entreprises privées réalisant une mission de service public. Cependant, pour les entreprises réalisant une mission d'intérêt général et non de service public, se verront appliquer le droit du travail en son article L 1121-1.
En conclusion, il en ressort que tout salarié de la fonction publique ne peut manifester ses opinions religieuses dans la réalisation de son travail. Cette disposition sera prévue au sein du Réglement Intérieur qui règlementera le "fait religieux". A défaut, il sera interdit que si l'agent est confronté au public. Néanmoins, la circulaire du 13 avril 2007 relative à la charte de laïcité dans les services publics, autorise les agents à s'absenter afin de participer à une fête religieuse. Ils devront prévenir leur employeur dans ce cas.
Pour le secteur privé, l'état du droit est différent. En l'espère, l'article L 1121-1 du Code du Travail s'applique : " Nul ne peut apporter aux droits des personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché." Disposition également présente au sein de l'article L 1321-3 du Code du Travail.
Comme le rappelle l'arrêt de l'Assemblée Plénière de la Cour de Cassation Baby Loup en date du 25 juin 2014, la liberté religieuse est reconnue au sein du secteur privé. Si l'employeur souhaite la restreindre, il devra remplir 2 conditions :
La loi accorde à l'employeur, en raison de son pouvoir de direction, la possibilité de limiter la liberté religieuse. Cette restriction sera possible dans les cas suivants :
L'article L 1132-1 du Code du Travail relatif à la discrimination en entreprise, dispose qu'aucun salarié ne pourra être écarté d'une procédure de recrutement ou être sanctionné, licencié en raison de ses croyances religieuses. La religion n'est pas un motif réel et sérieux de licenciement.
Cependant, le salarié doit respecter certaines règles. En effet, la HALDE (Haute Autorité de Lutte contre les Discriminations et pour l'égalité) rappelle que "le salarié ne peut invoquer des prescriptions religieuses pour refuser d'exécuter toute ou partie de ses missions contractuelles ou pour se soustraire à ses obligations légales."
Le salarié est tenu de respecter son contrat de travail, quelle que soit sa religion.
Comme toute liberté, l'abus dans son usage est interdit. En effet, la loi interdit tout abus dans l'exercice de la liberté religieuse. Ces abus peuvent se manifester par :
Si l'employé commet de tels actes, il pourra être sanctionné par son employeur.
La loi de 2016 a introduit l'article L 1321-2-1 au sein du Code du Travail, disposant que : " Le règlement intérieur peut contenir des dispositions inscrivant le principe de neutralité et restreignant la manifestation des convictions des salariés si ces restrictions sont justifiées par l'exercice d'autres libertés et droits fondamentaux ou par les nécessités du bon fonctionnement de l'entreprise et si elles sont proportionnées au but recherché."
La nouvelle loi a donc introduit le principe de neutralité religieuse mais aussi syndicale et politique. Grâce au Réglement Intérieur, l'employeur pourra restreindre la liberté religieuse. Cependant, plusieurs questions se posent :
L'introduction du principe de neutralité au sein du Code du Travail pose de nombreuses questions. De plus, les conditions pour le mettre en oeuvre son particulièrement floues, aucune définition n'est donnée aux termes utilisés par le législateur. Cette disposition sera hardue à mettre en oeuvre et va faire naître une certaine insécurité juridique ainsi que de nombreux recours quant à l'article.