Mathieu Gallet, actuel président de Radio France, a été condamné le 15 janvier à un an de de prison avec sursis et 20 000 euros d'amende pour favoritisme, il a fait appel et refuse de démissionner.
Le favoritisme, qui est définit à l'article 432-14 du Code pénal est un délit. Cette condamnation concernant l'ancien poste du dirigeant : celui de président de l'INA entre 2010 et 2014, est-il obligé de démissionner ? Un salarié condamné sur le plan pénal peut-il être licencié par son employeur ?
En principe, ce qui relève de la vie privée du salarié n’intéresse pas l’employeur. Ainsi, un salarié n’est pas obligé, lors d’un entretien, de faire mention d’une condamnation pénale ou d’une procédure en cours à son encontre. De la même manière, un salarié n'est en principe pas obligé de notifier à son employeur le fait qu'une procédure pénale est engagée à son encontre. La vie privée est un principe qui est consacré par l’article 9 du Code de procédure civile et qui est très importante dans notre droit.
Les informations que l’employeur peut demander à un salarié doivent avoir un lien direct et nécessaire avec l’emploi, qui est à pourvoir. Ainsi, certaines professions requièrent de facto un casier judiciaire vierge. Pour les emplois ayant un rapport avec l’éducation, l’animation, les forces de l’ordre, les candidats doivent fournir une preuve de leur absence de condamnation pénale (à l'aide d'un bulletin n°3 par exemple.)
Un employeur ne peut pas licencier un salarié pour des faits commis en dehors de l’entreprise. S’il le fait, le licenciement peut être abusif.
Exemple: un salarié travaillant sur un chantier et est condamné pour conduite sans permis, usage et détention de stupéfiant. Son employeur le licencie. Cependant, ce dernier n’a pas réussi à prouver dans quelle mesure il mettait ses collègues en prison et le licenciement a été annulé.
Si un employé est poursuivi et se trouve en détention provisoire, le principe de la présomption d’innocence s’applique : il ne peut être licencié pour ce motif. D’après la jurisprudence, le contrat de travail est simplement suspendu. Le salarié doit bien évidemment informer son employeur de la cause réelle de son absence et fournir un certificat de présence dans une établissement pénitentiaire, pour le prouver. L’employeur peut en revanche mettre en place des mesures conservatoires si elles sont justifiées, comme la mise à pied pour le salarié absent. Plus la peine est longue, plus il sera aisé pour l'employeur d'utiliser ces mesures pour écarter le salarié.
Un salarié ne peut pas être forcé de démissionner, la seule alternative pour son employeur est le licenciement. La jurisprudence a dégagé des cas dans lesquels l’employeur pouvait, licencier un salarié sur le fondement d’une condamnation pénale. Il existe deux cas de figure.
La condamnation pénale d'un salarié ne doit pas avoir pour conséquence de mettre en danger ses collègues ou bien de l'empêcher d'exercer son activité. Pour ces motifs il peut être licencié.
Exemple : un chauffeur, qui s’est vu retirer son permis pour conduite en état d’ivresse en dehors de son service, peut être licencié suite à la condamnation.
Les faits forment un manquement du salarié à des obligations appartenant à son contrat de travail.
En revanche, un employé jugé pour détention et usage de stupéfiant ne peut pas être licencié pour ce motif, si son employeur ne démontre pas qu'il met en danger ses collègues ou bien qu'il perturbe la vie de l'entreprise.
Si un employeur ne peut pas licencier un salarié lorsqu’il est en prison, son incarcération ne doit pas venir perturber l’entreprise. De même, si un salarié a été condamné pour des faits qui viennent troubler le fonctionnement de son service, il peut être licencié.
Exemple : Il a été jugé qu’un homme s’étant rendu coupable de viol sur mineur, avait pu être légitimement licencié par son employeur. La vie de son entreprise s’est trouvée affectée par cette condamnation et c’est pour ça que la Cour de cassation a légitimé son départ de l’entreprise. La publicité du jugement a pu être à l’origine de ces troubles.
Le juge estime également que pour certains comportements inappropriés, qui se déroulent en dehors de l’entreprise comme le harcèlement sexuel, mais entre employés de l’entreprise, justifient une sanction.
Dans ce cas de figure, ce sont les conséquences que la condamnation a sur l’entreprise, qui pourront motiver ou non un licenciement de la part de l’employeur.
Dans le cas de Mathieu Gallet, étant donné qu’il travaille dans une institution publique, c’est au Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) qu’il appartient de se prononcer sur une potentielle exclusion de l’actuel président. S'il refuse de démissionner il ne pourra pas lui en être tenu rigueur, étant donné que c'est suite à une procédure de licenciement seulement, qu'il pourrait être contraint de quitter ses fonctions. S'il reste dans son droit, c'est sa légitimité, qui est aujourd'hui remise en cause et c'est une toute autre chose.