Qu'est-ce qu'une rupture conventionnelle ? Le salarié peut-il se rétracter suite à son accord sur la rupture conventionnelle ? De quel délai le salarié dispose-t-il pour se rétracter ? Quelle procédure doit-il mettre en oeuvre pour se rétracter ? Quelles seront les conséquences ?
Me Audrey PASCAL est avocate au Barreau de Limoges. Docteure en Droit, elle a écrit plusieurs ouvrages en Droit du travail et de l’emploi.
La rupture conventionnelle est une convention par laquelle l’employeur et le salarié conviennent d’un commun accord de rompre le CDI qui les lie. L’employeur et le salarié fixent alors les conditions de cette rupture qui ouvre droit pour le salarié au bénéfice des allocations chômage.
Ce mode de rupture du contrat de travail ne s’applique ni au CDD ni au contrat d’apprentissage. Il ne peut pas non plus intervenir dans certaines situations. Par exemple, la rupture conventionnelle n’est pas applicable aux ruptures de contrats de travail résultant des accords collectifs de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ou des plans de sauvegarde de l’emploi (PSE).
La rupture conventionnelle est bien une procédure de rupture du contrat de travail d’un commun accord entre le salarié et l’employeur. Elle ne peut pas être imposée par l’une ou l’autre des parties. Ce n’est ni un licenciement ni une démission.
Le salarié dispose effectivement d’un droit de rétractation, tout comme l’employeur.
A compter du lendemain de la date de signature de la convention de rupture conventionnelle, le salarié dispose d’un délai de 15 jours calendaires (tous les jours de la semaine sont comptabilisés) pour exercer ce droit de rétractation.
Lorsque ce délai expire un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, il est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant (les jours ouvrables correspondent à tous les jours de la semaine, à l'exception du dimanche et des jours fériés ou chômés).
Une fois le délai de 15 jours expiré, le salarié ne peut plus se rétracter. Cependant, par la suite, le salarié peut toujours contester la rupture conventionnelle par voie judiciaire, devant le Conseil des Prud’hommes, s’il arrive à prouver que son consentement n’a pas été valablement donné. Par exemple, dans un contexte de harcèlement moral, en cas de violence psychologique, le consentement du salarié ne peut naturellement pas être librement donné.
Le droit de rétractation est exercé sous la forme d’une lettre recommandée avec demande d’avis de réception (LRAR) ou par lettre remise à l’autre partie en main propre contre décharge mentionnant la date de remise (voire même par courriel dès lors que le salarié peut justifier de la date de sa réception par son destinataire).
Attention, pour que la rétractation soit valablement donnée, la lettre doit impérativement être adressée à l’employeur et non pas à l'inspection du travail.
En revanche, la loi n’impose pas à la partie qui décide de se rétracter de motiver sa décision.
En cas d’usage du droit de rétractation, la procédure de rupture conventionnelle cesse. La demande d’homologation de la convention de rupture conventionnelle n’est pas transmise à l’autorité administrative compétente (qui est le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi - DIRECCTE).
Le contrat de travail n’est pas rompu et se poursuit normalement d’un point de vue juridique. Il s’exerce dans les mêmes conditions, « comme si de rien n’était ».
Dès lors, si une deuxième rupture conventionnelle venait à être engagée à la suite d'une première pour laquelle le droit de rétractation a été exercé par le salarié, l'ensemble du processus de négociation doit être repris du début. L’employeur doit respecter, à nouveau, l'ensemble des conditions de procédure obligatoire pour que la seconde rupture conventionnelle soit valable.
En général, le salarié souhaite exercer son droit de rétractation suite à une décision prise trop hâtivement, sur un « coup de tête ». Le délai de 15 jours pendant lequel il est possible de se rétracter permet au salarié de prendre du recul, de mesurer sereinement la portée de sa décision qui n’est pas anodine, faut-il le rappeler, puisqu’elle signifie la rupture du contrat de travail.