Depuis quatre ans, le nombre d’arrêt maladie en France est en hausse constante, pour atteindre 8% de plus au mois de janvier par rapport à l’année passée.
Le fait de réduire les dépenses de santéest un objectif affiché des gouvernements successifs, mais ces derniers se retrouvent face à une augmentation constante des arrêts maladies qui ont coûté l’année passée 10,3 milliard d’euros à l’assurance maladie.
Plusieurs causes sont régulièrement invoquées pour expliquer ce phénomène. Certains dénoncent des médecins trop laxistes, qui arrêtent facilement les salariés au moindre rhume, d’autres expliquent qu’avec la baisse du chômage, il y a plus de personnes occupant un emploi, donc plus de salarié potentiellement arrêté. Mais ces explications ne suffisent pas et ne montrent pas le visage d’une autre augmentation : celle du nombre de burn-out et ses conséquences sur la santé générale des salariés.
Le burn-out, c'est cet épuisement généralisé, qui découle notamment de l’effritement entre la frontière vie professionnelle et vie privée. Facilitée par les outils numériques dans l’entreprise, causant un blurring de plus en plus important, le burn-out dû à l'hyper connectivité des salariés devient un véritable enjeux pour les pouvoirs publics.
Etre trop connecté peut-il vous rendre malade ?
Le burn-out n’est pas reconnu comme une maladie professionnelle. On parle couramment d’épuisement professionnel, de souffrance psychique au travail, mais une définition rigoureuse et définitive n’existe pas encore. Une récente proposition de loi devant le Parlement, visant à le faire reconnaître et l’inclure dans le tableau des maladies professionnelles a été rejeté par les députés.
Malgré cette « non reconnaissance », l’épuisement professionnel peut tout à fait l’objet d’un arrêt de travail. Les motifs alors invoqués par les médecins peuvent être divers. Les syndromes liés à cette souffrance psychiques, bien réels sont eux reconnus. Il peut s’agir de troubles, angoisse générant des maladies cardio-vasculaires, des troubles musculosquelettiques. A l’origine le burn-out désignait le personnel soignant, débordé et ne pouvant plus faire face aux maladies de leurs patients. Avec le temps, ce sont tous les secteurs, qui sont concernés. On évalue le nombre de cas de burn-out entre 300 000 et 3 millions en France.
Lors d’un burn-out, le salarié pense sans arrêt à son travail et cela devient une préoccupation si importante, qu’il se rend malade. L’accès aux nouvelles technologies donne la possibilité de travailler depuis n’importe où et accroît cette pression.
Pour lutter contre cette pathologie il n’est pas possible de faire l’impasse sur son lien avec la généralisation, de l’utilisation des nouvelles technologies.
Le droit à la déconnexion est un véritable enjeu pour les cadres et de manière générale, les salariés travaillant dans le secteur tertiaire. En effet, rien de plus facile que de ramener du travail chez soi, bien après avoir quitté son entreprise. Sur son ordinateur personnel, son smartphone les informations continuent d’affluer.
A ce moment là, l’épuisement professionnel peut être causé par deux facteurs, l’hyper sollicitation des salariés et la « fear of missing out », littéralement « peur de manquer quelque chose. » Cette peur, c’est celle de manquer quelque chose d’important : un mail, une interaction sociale. Cette angoisse se caractérise par le fait d’être scotché à son smartphone, pour voir et répondre au moindre message, à la moindre notification. Cela peut, conduire à répondre instantanément à ses mails, même s’il est 23h.
La sur sollicitation engendre du stress, du fait du zapping constant constitué par l’arrivée de notification et la surinformation de l’employé. D’après le ministère du travail, 36% des salariés utilisent les outils numérique professionnels, en dehors de leur temps de travail. Concernant les cadres, ils sont 3 sur 4 à se connecter chez eux. Ces faits, en plus d’empiéter sur la vie privée des salariés, n’augmentent pas la productivité en créant des perturbations permanentes, qui empêchent une concentration durable du cerveau.
Face à ce phénomène de société, en France comme en Europe, les Etats légifèrent progressivement, conscients que la prévention a un rôle décisif dans le traitement du burn-out.
Dès 2015, un rapport sur "l’impact du numérique sur le travail" parlait déjà de la nécessité d’un droit à la déconnexion. Le 1er janvier 2017, à l’article 55 de la loi travail, a instauré un droit à la déconnexion, ayant pour objectif de faire mieux respecter le temps de repos des salariés. En pratique, cela signifie par exemple, que les salariés travaillant dans une entreprise de plus de 50 salariés, n’ont pas à répondre aux mails de leurs collaborateurs durant leur repos. Ce droit à la déconnexion, ne dresse pas une liste de mesure contraignante pour les entreprises, leur seule obligation est celle de mener une négociation, sur la mise en place de ce droit.
Etre connecté en permanence à son réseau, peut donc avoir des impacts négatifs sur le cerveau, voir rendre malade, mais il ne faudrait pas s’arrêter là. En effet, le numérique reste un outil, au service d’une manière d’organiser le travail.
Les nouvelles technologies et leur disponibilité permanente permet aussi à certains salariés d’adapter leur travail à un mode de vie qui favorisera leur bien-être, en s’affranchissant du cadre rigide du bureau. Il s’agit par exemple du télétravail, de la possibilité d’aménager son temps pour coller à son rythme de vie. Avec comme exemple ultime ceux, qui se rêvent « digital nomade », quelque part avec comme espace de coworking un café au bord de la côte atlantique, un laptop sur les genoux et l’océan comme open space. Mais avant d’en arriver là, encore faudra-t-il soigner les nouvelles pathologies du travail, rendre effectif le droit à la déconnexion et continuer de questionner la relation entre utilisation de la technologie et temps de travail.