Qu'est-ce qu'un risque psychosocial ? Quels sont les risques psychosociaux identifiables ? Quels sont les facteurs susceptibles de pouvoir les déclencher ? Quelles peuvent être les conséquences des risques psychosociaux pour les entreprises ? Existe-t-il des moyens pour les prévenir ?
__Olivier d'ARDALHON DE MIRAMON, 54 ans, plus de 20 ans d'expérience comme avocat spécialisé en droit du travail, plus particulièrement sur une clientèle de cadres et dirigeants mais pas exclusivement. Il traite également les difficultés liées aux accidents du travail et maladie professionnelle sur lesquelles il y a beaucoup à dire. La santé au travail est un sujet désormais essentiel. Son parcours est atypique puisqu'il a commencé sa vie professionnelle, après un bac plus 5 en droit, par une incursion dans diverses ambassades de France à l'étranger, puis dans la presse, puis en dirigeant un Automobile Club, avant d'embrasser la profession d'avocat en réussissant le concours d'entrée à la profession et en créant rapidement sa propre structure d'exercice.__
Excellente question, il est très important de définir préalablement de quoi on va parler. On peut définir le risque psychosocial comme étant tout élément, dans l'entreprise ou l'environnement professionnel, de nature à affecter la santé physique mais surtout mentale d'un salarié. Il s'agit des affections psychiques ou psychologiques que le travail, dans l'entreprise ou la société qui vous emploie, est susceptible de créer.
Les risques identifiés sont le stress, la dépression, le suicide, l'épuisement professionnel ou "Burn Out", le harcèlement sexuel ou moral entrant dans le champs plus général des violences au travail.
Il existe une multitude de facteurs susceptibles de pouvoir déclencher ces affections psychologiques et c'est une difficulté de la matière. Comment prouver, par exemple, qu'une dépression ou un épuisement, voir même un suicide, est la conséquence du seul environnement professionnel ? On peut donc s'appuyer sur des indicateurs comme le taux d'absentéisme, le nombre d'arrêts maladie, le turn over ou les plaintes , les actes de violence, pour les évaluer en terme d'évolution, de fréquence, de cause, et de services concernés et ainsi cerner et tenter d'analyser les facteurs de risques.
Cela peut aller de la surcharge de travail à un manque de clarté dans le partage des tâches, de l'intensification du travail à un mauvais mode de management ou d'organisation de l'entreprise ou du service, mais également à un contexte ou des situations dangereuses (ainsi les urgences dans les hôpitaux où les agressions des patients deviennent légion contre le corps médical générant pour lui peur, stress, voir stress post traumatique); sans compter l'imbrication de divers facteurs de risques qui en fait naître d'autres: ainsi une mauvaise organisation dans un service, couplé ou non avec une surcharge de travail, peut engendrer des violences, voire des agressions.
On est, à peine, en train de comprendre que le règlement de cette question est fondamental pour la bonne santé, ne serait ce qu'économique, de l'entreprise. L'impact du phénomène, au niveau de l'entreprise, s'évalue en terme d'arrêts de travail, de turnover, d'accident du travail ou maladie professionnelle ce qui génère d'évidents manques à gagner, des perte de temps en terme d'organisation, d'administration, de gestion du personnel, des tensions; bref des freins absurdes qui coûtent chers à l'entreprise mais également à la société en général.
Sur le plan juridique et légal, le principe est posé selon lequel pèse sur l'employeur une obligation de résultat quant à la préservation de la santé de ses salariés. C'est le fondement de la prévention des risques. Les outils mis à sa disposition pour garantir le respect de son obligation existent également. Ils passent d'abord par l'obligation, pour l'employeur, d'identifier et d'évaluer les facteurs de risques au sein de son entreprise : c'est le Document Unique d'Evaluation des Risques (DUER) qui doit être mis à jour tous les ans et qui doit répertorier les différents risques physiques ou psychosociaux susceptibles d'exister. Le but étant de proposer alors des actions préventives et d'en suivre le résultat. Evidemment cela reste, pour des petites structures non dotées d'institutions représentatives du personnel, relativement théorique.
En revanche, le CHSCT a accès à ces informations et peut proposer des mesures à mettre en place au niveau préventif et en suivre l'évolution.
Egalement le médecin du travail et les services de santé interentreprises disposent d'une fiche d'entreprise recensant les risques professionnels et les effectifs de salariés exposés à ces risques, laquelle fiche est tenue à la disposition de l'inspection du travail.
Mais au-delà de cela, des dispositions concrètes peuvent être consignées dans des accords signés avec les partenaires sociaux au niveau de l'entreprise ou des branches d'entreprises ou dans le règlement intérieur.
Les acteurs de la lutte contre les risques psycho-sociaux sont, outre les institutions représentatives des salariés, la médecine du travail, l'inspection du travail, les CHSCT, les salariés et les employeurs eux-mêmes. Il appartient, quelle que soit la taille de l'entreprise, pour un salarié d'alerter ou de dénoncer une situation à risque à son employeur et à ce dernier de comprendre qu'il est de son intérêt d'y mettre un terme ou de la prévenir. Finalement le bon sens rejoint assez souvent le droit.